Comment fournir des dispositifs médicaux répondant aux besoins d’intégrité des patients ? Présentation et explication d’un cas d’entreprise portant sur des dispositifs médicaux répondant aux besoins d’intégrité des patients.

Lien entre “Care” et “Design”

En ces temps de crise sanitaire, nous voyons se développer la notion de Design Care, dans les articles, dans les médias, dans les discours, dans les écoles de design, dans le positionnement affirmé d’agences de design. Le terme « care » est très souvent utilisé pour signifier en français : soin, bienveillance, attention à autrui. Mais associé au terme « design », cela pourrait aiguiser votre curiosité. Pour DiCi, il est clair que le design est tourné vers l’attention à l’autre.

Ces dernières années, les étapes de la conception se sont grandement formalisées pour simplifier la démarche. On retrouve, par exemple, le double diamant du Design Council ou le Design Thinking conçu par les équipes de l’agence IDEO. Sous une forme ou sous une autre, cette discipline démarre toujours par un temps indispensable, incompressible et assez long. Il est dédié à l’observation de l’environnement et de l’écosystème de l’usager pendant les immersions sur le terrain afin d’en retirer des enseignements. Un temps est également dédié à l’écoute des usagers et parties prenantes lors d’interviews, afin de préciser les besoins de chacun et trouver une solution collectivement et unanimement choisie.

En pleine empathie et avec beaucoup d’humilité, le designer est à l’écoute du moindre signe de communication non-verbal, que l’émetteur lui transmet. Il reste en alerte sur tous les soupirs, haussements d’épaules, regards fuyants, primordiaux lors de cette phase. La forte sensibilité humaine du designer, est un outil crucial pour les interpréter, s’en défaire ou les faire préciser. On fait appel à cette sensibilité, tout au long du processus. Elle permet de maintenir la cohésion du groupe de travail, pour stimuler et structurer les pensées, les formaliser et faire émerger des idées émanant de l’ensemble des métiers représentés dans le projet. Cette forme de posture, s’impose à tous les projets de design.

Ces derniers temps, la dimension du sensible est d’autant plus mise à mal, par deux éléments forts de notre quotidien. Le masque réduit de 50% l’expression faciale et l’appréciation sensible des émotions. La distanciation sociale s’installe comme une norme qui accentue cette perte. C’est un point de vigilance que toutes les organisations devraient avoir. Le langage non-verbal a beaucoup de choses à dire.

Sans cette phase d’ouverture et d’observation, la précision des besoins ne peut avoir lieu, la réponse créative ne peut être trouvée et les phases de prototypage ou de test, n’ont aucune chance d’aboutir.

Une nouvelle vague humaniste

Malheureusement, cette discipline n’a pas toujours été appliquée, par certains, avec le souffle d’humanité qu’on lui voit attribuer ces derniers temps. Au début des années 70, Victor Papanek, designer écologique qui prône l’équité sociale et l’éthique, révoque ouvertement le design industriel à but uniquement lucratif. Dans son ouvrage « Design pour un monde réel » , il dénonce le fait que le designer, est engagé dans une logique de marché à la merci du business. Pour lui, il obéit à cette logique pour des raisons économiques sans aucune forme d’éthique. « Peu de professions sont plus pernicieuses que le design industriel. Il n’y a peut-être qu’une seule autre profession qui soit plus factice : le design publicitaire, qui persuade les gens d’acheter des objets dont ils n’ont pas besoin, avec de l’argent qu’ils n’ont pas, afin d’impressionner d’autres gens qui s’en moquent. »  Il va jusqu’à dire que « les designers sont devenus une race fort dangereuse et c’est avec grand soin qu’on enseigne aux jeunes les compétences nécessaires à l’exercice de ces activités. » A l’époque déjà, il appelle chacun à se réveiller et à lutter pour faire valoir les valeurs d’un design plus éthique, écologique, frugal et répondant aux besoins essentiels : « La paix, l’air pur, l’eau pure, la liberté, l’égalité, le logement, la nourriture, les vêtements, l’éducation, le “travail” en tant qu’activité dotée de sens et les enfants » [1] C’est un ouvrage qui a secoué la profession et qui l’a lentement dirigée vers une voie plus authentique, plus éthique et moins mercantile.

Empathique pour des projets éthiques

En 2020, le designer embrasse une posture humble. Sa pensée transverse, étoilée et inclusive, stimule les cerveaux de tous les acteurs du projet et permet d’atteindre une forme de réponse correspondant à toutes les nécessités. En parallèle, on attribue au design la possibilité de répondre aux besoins de transformation du monde avec éthique, pour le bien de l’humanité. Le design contribue ainsi à l’engagement sociétal de respect de l’individu. Chez DiCi, nous collaborons avec une entreprise normande, qui propose des dispositifs médicaux dédiés à l’amélioration des conditions de travail des professionnels de santé et qui favorise, par l’administration de ses dispositifs, le maintien de l’intégrité des patients.

Dans un premier temps, une branche de cette entreprise dédiée aux solutions buccales, a fait appel à la démarche design pour prendre de la hauteur sur son activité et analyser l’état des lieux de son écosystème. Dans un second temps, le désir d’intégrer les marchés hospitaliers s’est fait sentir. Répondre aux cadres imposés par les appels d’offres publics en France, est devenu un enjeu important. Les designers et les équipes de cette belle PME (commerciaux et techniciens de santé) ont travaillé ensemble lors d’ateliers collaboratifs. Ils ont pu faire émerger les freins, les forces internes à l’entreprise, les opportunités et les menaces du marché pour connaître les objectifs à travailler et répondre à cet enjeu. A l’issue de ces ateliers, des échanges avec les professionnels de santé ont été très instructifs. Leurs contraintes de travail, leurs besoins quotidiens ont été particulièrement écoutés.

Les précisions apportées deviennent une matière première que les équipes transdisciplinaires travaillent ensemble. Ainsi, ils ont trouvé des axes d’innovation pour se démarquer de la concurrence. La solution sous forme de kit de soins de bouches, répond aux besoins sanitaires des patients et des professionnels médicaux, mais également aux exigences des appels d’offres publics. En étant au plus près des attentes et des usages des professionnels et de leur écosystème, les designers sont ainsi dans une démarche d’intégrité humaine et de respect des individus.


Caroline Saunier pour DiCi

[1]  ‘Big Character’ Poster N ° 1 Work Chart For Designers, 1969